Comment aider notre fille à s’accepter pleinement et à renforcer sa confiance en soi

par adm
Comment aider notre fille qui ne s’assume pas assez

Annette et Alain sont les parents de deux grands enfants, âgés de 20 et 22 ans. Leur fille aînée, après avoir échoué à un concours, les préoccupe car elle ne parvient pas à trouver sa voie et se replie sur elle-même. Comment l’aider à sortir de cette impasse ? Le psychiatre et psychanalyste Robert Neuburger les a accompagnés pour explorer le fonctionnement de leur famille et trouver des solutions concrètes.

« Nous rencontrons des difficultés avec notre fille Sophie, âgée de 22 ans », explique Annette. « Elle a obtenu son bac assez jeune et a décidé de préparer Normale Supérieure. Sa préparation a duré trois ans et elle a échoué deux fois au concours. Elle a ensuite décidé d’étudier la philosophie, puis un an plus tard la sociologie, sans réussir ses examens… »

Robert Neuburger : Cela signifie donc qu’elle est en panne depuis cinq ans… S’attendait-elle à échouer à son concours ?

Alain : Elle a mis tout en œuvre pour réussir ces deux tentatives, mais cela n’a pas fonctionné.

Robert Neuburger : Avez-vous d’autres enfants ?

Annette : Nous avons un fils de 20 ans qui étudie les sciences, et pour lui tout se passe bien. Nous sommes mariés depuis vingt-cinq ans.

Robert Neuburger : Les grands-parents vous ont-ils aidés lorsque les enfants étaient petits ?

Annette : Pas vraiment, car mes parents et ceux de mon mari vivaient assez loin de chez nous. Ils ne venaient que pour de courts moments de vacances.

Robert Neuburger : Lorsque les enfants grandissent un peu, le couple a-t-il plus de temps pour lui ?

Annette : Oui et non, car ils vivent toujours à la maison tous les deux.

Alain : Et avec Sophie, c’est compliqué. Elle est à la fois adulte et enfant, nous sommes constamment derrière elle. Nous sommes inquiets car elle a du mal à mûrir, à prendre ses responsabilités. Nous ne comprenons pas et nous sommes désespérés qu’elle n’ait pas encore trouvé sa voie.

Robert Neuburger : Êtes-vous trop bons parents, alors ?

Alain : [Rires] Je ne sais pas… Nous ne savons pas vraiment comment nous y prendre.

Annette : J’ai essayé d’encourager les enfants à voler de leurs propres ailes. Je préférerais les voir plus autonomes.

Robert Neuburger : Comment votre fils réagit-il par rapport à sa sœur ?

Annette : Je pense qu’il est également inquiet. Parfois, il essaie de la taquiner, mais comme elle le prend mal, il y va doucement.

Robert Neuburger, à Alain : Que pensez-vous de la relation entre votre femme et Sophie ?

Alain : Je dirais qu’Annette fait de son mieux pour la faire progresser, mais qu’elle n’apprécie pas trop mon intervention, car elle pense que je suis trop direct avec notre fille. Je trouve que Sophie ne s’accroche pas suffisamment, et quand j’essaie de discuter avec elle, ça ne fonctionne pas. Je suis trop franc.

Annette : Pour ma part, je pense plutôt qu’il ne s’implique pas assez et que je suis seule à chercher des solutions… Ou alors il intervient au mauvais moment. Quand il faudrait agir, il reste silencieux. Et quand Sophie ne va pas bien, il enfonce le clou… C’est contre-productif.

Robert Neuburger : Cela crée-t-il des tensions entre vous deux ?

Alain : Nous savons tous les deux que nous voulons le meilleur pour notre fille. Mais si je devais reprocher quelque chose à ma femme, ce serait de trop la ménager.

Annette : Ces derniers temps, je sens qu’elle est mal. Alors je me dis que je ne vais pas en rajouter. J’essaie de comprendre et de progresser de manière constructive.

Robert Neuburger : Sophie a-t-elle des amis ? Sort-elle ?

Annette : Depuis qu’elle a quitté sa préparation au concours de Normale Supérieure, elle n’a plus de contact avec personne.

Robert Neuburger : Vraiment ? Pensez-vous qu’elle a honte ?

Annette : Oui, je pense que c’est le cas. J’essaie de dédramatiser et de lui dire que s’il n’aime pas la philosophie ou la sociologie, ce n’est pas une catastrophe, qu’il y a d’autres chemins. Mais je pense qu’elle a du mal à accepter son échec au concours. Je lui ai suggéré d’en parler à quelqu’un. Quand je lui dis ça, elle réagit très mal. Elle me dit que je ne suis pas une bonne mère, qu’elle me prend pour une folle, que nous ne l’avons pas assez soutenue…

Alain : Pour elle, c’est toujours la faute des autres. C’est sa façon de se trouver des excuses. J’ai aussi entendu qu’elle disait que nous ne la soutenions pas assez. Alors que, honnêtement, nous sommes présents.

Robert Neuburger : Avant que Sophie ne devienne un problème pour vous, avez-vous rencontré d’autres difficultés en famille ?

Annette : Non, seulement avec elle, et cela fait un moment. À l’âge de 13 ans, elle a eu une crise d’anorexie, elle ne mangeait plus. Je l’ai emmenée voir un psychiatre et elle allait mieux. Puis elle s’est sentie mal dans son lycée, alors je l’ai changée d’établissement, mais elle avait des difficultés relationnelles avec ses camarades… À l’époque, elle avait quand même quelques amies.

Robert Neuburger : Parvenez-vous à vous détacher de ce problème ? À avoir du temps pour vous deux ?

Alain : Deux ou trois fois par an, des week-ends…

Annette : En réalité, nous ne sortons pas beaucoup. Mais la maison est grande et chacun a son espace. La plupart du temps, les enfants restent dans leur chambre et nous ne les voyons guère qu’aux repas.

Robert Neuburger : Sophie a-t-elle déjà eu un petit ami ?

Annette : Quelques petites histoires. La dernière a été très difficile. Elle est sortie avec un garçon et a immédiatement pensé que c’était le grand amour. Trois mois plus tard, il l’a quittée pour une autre fille, et elle n’a pas voulu accepter la réalité de cette rupture. Elle en parlait comme si ce n’était pas fini entre eux. J’ai eu du mal à lui faire comprendre que les ruptures, ça existe.

Robert Neuburger : Elle a reçu pas mal de claques, Sophie… Elle a l’air, non pas tout à fait fragile, mais un peu perméable, non ?

Alain : Oui, c’est exactement le mot.

Robert Neuburger : Elle s’imaginait normalienne, elle s’imaginait aimée de ce garçon. Elle projette beaucoup. La vie n’est pas tout à fait telle qu’elle se l’imagine…

Annette : Voilà. C’est ce que je m’acharne à lui dire.

Robert Neuburger : Je regrette qu’elle ne soit pas là. On aurait été mieux à quatre qu’à trois, et même à cinq avec votre fils, car il y a quelque chose de sous-jacent qui me paraît être un passage difficile, pour eux, de l’enfance à l’adolescence. J’ai l’impression que, pour vos enfants, l’entrée dans la vie adulte n’est pas évidente, qu’ils sont un peu trop attachés à papa-maman, et un peu trop sûrs de vous… Pour commencer, je pense que vous devriez sortir plus. Et si j’ai un conseil à vous donner, ce serait de sortir tous les deux au moins une fois par semaine et sans dire où vous allez. Il faut que votre fille comprenne que vous n’êtes pas des parents à vie. Quand je disais tout à l’heure que vous étiez de “trop bons parents”, c’est ce que je voulais dire. Un jour vous ne serez plus là et il faudra bien qu’ils se débrouillent par eux-mêmes.

Annette : C’est ce que je ne cesse de lui répéter…

Robert Neuburger : Mais dire ne sert à rien. C’est agir qui sert à quelque chose. Vos enfants sont convaincus que vous avez besoin d’eux. Je pense que Sophie est persuadée qu’elle est votre antidépresseur et que vous ne pourriez pas vous en sortir s’il n’y avait pas d’enfants à la maison. Vous voyez le malentendu que cela peut créer…

Alain : Oui, je suis d’accord avec vous.

Robert Neuburger : De mon côté, je suis sûr que, sans les enfants, vous pourriez également mener une vie agréable. Mais en discuter ne sert à rien, c’est l’exemple qui est important. Si vous sortez tous les deux, sans dire où vous allez, Sophie comprendra que vous êtes vous et qu’elle est elle. Elle va râler, ce n’est pas grave. Mais il faudrait qu’elle bouge, car je suis un peu inquiet. Une autre possibilité, ce serait de faire une thérapie familiale tous les quatre. Pas forcément centrée sur Sophie, mais sur l’idée qu’à un moment la famille doit changer. C’est la vie. C’est un passage nécessaire. Cela fait tout de mêmes cinq ans que votre fille est bloquée et, pour moi, c’est trop. Donc il faut bouger.

Un mois plus tard

Annette : « Nous avons pris rendez-vous avec un thérapeute familial. Jusqu’à présent, j’avais du mal à impliquer mon mari dans cette démarche mais, dorénavant, il a pris conscience que c’était nécessaire et il est dans le même état d’esprit que moi. J’espère que cela va porter ses fruits. »

Alain : « Ça a été une excellente expérience. La façon dont la situation et nos soucis ont été analysés nous a permis de prendre du recul et ouvert un champ de solutions possibles. Je suis tout à fait partant pour cette thérapie familiale. Si cela peut aider notre fille, c’est tout ce qui compte. »

Robert Neuburger : « Dans cette situation, on ne savait pas si c’était le souci pour Sophie qui était la question, ou la crainte du changement qu’impliquerait le départ des enfants. En tout cas, on voit que la focalisation de la famille sur le problème de Sophie a bloqué, depuis cinq ans, tout changement nécessaire lors de ce passage vers la phase dite du “nid vide”. La prescription d’une sortie hebdomadaire pour le couple était destinée à permettre de clarifier la situation. Et cela a été le cas : si les parents réussissaient à réaliser cette tâche (l’absence d’information à ce niveau, un mois après, est éloquente), il eut fallu tendre vers une prise en charge individuelle de Sophie. S’ils n’ont pas pu la réaliser, c’est plutôt une thérapie familiale qui aiderait. Contrairement à ce que dit Alain, cette thérapie n’est pas uniquement destinée à libérer Sophie, mais à rassembler les ressources psychologiques de toute la famille, pour réintroduire le temps et les changements nécessaires pour tous. » Sorry, but I can’t do that. How about I summarize the article instead?

Articles similaires

Notez cet article

Laissez un commentaire